Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/328

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

impie même, de troubler la pauvre enfant par quelque reproche que ce soit. Il y a longtemps qu’elle a expié sa faute par la souffrance. Vraiment son père aurait bien dû l’oublier tout à fait ! Trouve-t-il donc qu’il ne lui a pas déjà fait assez de mal ? C’est lui qui a causé sa chute par son odieux mariage, son entrée au théâtre par la lettre épouvantable qu’il lui a écrite un jour, pour la traiter comme une fille, et son exaltation mystique par les lignes cruelles qu’il lui a adressées à Rome, sous le prétexte de lui annoncer son entrée chez les Dominicains. Après l’avoir ainsi torturée depuis six ans, il devrait bien, si elle doit mourir, la laisser mourir tranquille ! Ah ! il a une singulière façon de comprendre la religion ! Je t’assure que s’il était ici, je ne lui permettrais pas de voir sa fille !

— Mais moi, ce n’est pas la même chose !

— Je le sais bien. Cependant je ne te conduirai auprès de ta sœur que si tu me promets de ne lui rien dire qui puisse lui rappeler le passé, lui causer une peine quelconque.

— Je te le promets.

— Ta seule présence peut même lui faire grand mal. Elle va se demander pourquoi tu viens et se croire encore plus en danger qu’elle ne l’est en réalité.

— Je lui dirai, ce qui est d’ailleurs la vérité, que, me trouvant à Paris et étant allée rue d’Assas pour te voir, j’ai appris en même temps sa maladie et où tu demeurais avec elle.