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oreilles roses délicieusement ourlées. Son opulente chevelure noire, soyeuse, à reflets bleuâtres, encadrait merveilleusement son front, dont elle faisait ressortir la pureté ainsi que la pâleur mate mais saine de son teint, puis elle se révoltait sur sa nuque, légèrement ambrée, en frisons rebelles.

Peut-être trop petite, mais faite à ravir, Éva avait les épaules un peu tombantes, la poitrine pleine, bien placée, la taille svelte et ronde, ce qui donnait à son buste une voluptueuse élégance. Ses extrémités étaient restées celles d’une fillette de quinze ans. Le port de sa tête, sa marche, tous ses mouvements étaient gracieux, et cependant, malgré la délicatesse de ses formes et la mièvrerie fréquente de ses attitudes, elle était d’une vigueur peu commune chez les femmes. Nageuse infatigable, écuyère intrépide, impassible en face du danger, disposée à toutes les hardiesses, il y avait en elle une virilité native puissante, qui s’était encore développée sous l’influence de l’éducation mâle qu’elle avait reçue. On eût dit que son père, prévoyant les luttes qu’elle aurait à subir un jour physiquement et moralement, avait voulu l’y préparer.

Car Éva était, au moral, le même être complexe qu’au physique. Tour à tour croyante jusqu’au mysticisme, ou subitement envahie par le doute, d’une fermeté inébranlable ou d’une faiblesse d’enfant, pleine d’orgueil ou d’humilité, de confiance en l’avenir ou de désespérance, d’une gaieté folle ou d’une tristesse profonde, tyrannique ou soumise,