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d’Assas, d’où elle était bien vite repartie en emmenant Robert, endormi dans les bras de Jeanne,

Aussi était-il à peine deux heures lorsque, conduite par une religieuse, car elle ne se souvenait guère du chemin qu’elle avait parcouru le jour précédent, elle entra chez la détenue.

— Toi, ma bonne tante et avec mon fils ! s’écria la fille du pamphlétaire.

Elle prit dans ses bras le bébé qui riait, le couvrit de baisers, le fit sauter sur ses genoux, riant elle-même, oubliant où elle était, ne se rappelant plus les tortures de la veille, ne craignant pas celles du lendemain. On lui eût murmuré à l’oreille : « Saint-Lazare, » qu’elle n’aurait pas compris.

Puis son premier élan maternel satisfait, Éva remercia Mme  Bertin qui, alors, seulement alors, tirant de dessous son vêtement une demi-douzaine de belles roses blanches, les lui donna sans prononcer une parole, mais avec un regard si doux et si éloquent, que la condamnée murmura, en laissant tomber une larme sur les fleurs, comme pour prolonger leur existence éphémère :

— Lui, lui ! Il ne m’oublie donc pas !

Gilbert, en effet, n’avait pas oublié et ne pouvait oublier Mme  Noblet, tant était grande la place qu’elle avait prise dans sa vie, tant il regrettait son impuissance à lui venir en aide, tant il avait l’ambition de se dévouer pour elle.

Depuis le moment où il l’avait vue partir entre le commissaire de police et son secrétaire, il n’était