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— Vous avez raison ! Le temps de prendre un manteau et je cours chez lui.

— Je ne puis vous accompagner, j’ai promis à Bernel de ne pas sortir avant son retour. Et dire que c’est moi qui suis cause de tout le mal !

— Vous ?

— Certes ! N’était-ce pas mon devoir d’honnête homme de dissimuler mes sentiments ? Si j’avais eu plus de courage, si Mme Noblet n’avait pas su qu’elle pouvait compter sur moi, je serais resté pour elle un inconnu, et elle ne serait pas à cette heure victime d’une accusation mensongère que, pour lui obéir, nous ne pouvons même repousser. Jamais je ne me pardonnerai d’avoir ainsi troublé sa vie !

— Vous êtes fou, mon ami ! N’est-ce pas moi seule qui ai fait tout le mal ? Mais, qui sait ? peut-être vaut-il mieux pour Éva que les choses finissent ainsi. Savez-vous ce qui serait certainement arrivé si on l’avait livrée de force à son mari ? Il l’aurait emmenée à Londres et elle se serait tuée. Oui, tuée, comme s’est tué son frère !

Ces deux braves cœurs se rejetaient l’un sur l’autre ce qui n’était que le fait du hasard ou plutôt de la fatalité qui avait, à leur berceau, marqué les enfants de M. de Tiessant pour l’infortune !

Moins d’une demi-heure plus tard, Mme Bertin apprenait à Me Mansart ce qui était arrivé, et le savant avocat, après avoir rassuré de son mieux la brave femme, courut au Palais pour y voir le procureur impérial.