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autre porte solide, plus large, habilement dissimulée dans la maçonnerie et donnant dans la muraille contre laquelle il paraissait construit.

Cette porte ouverte, il distingua un passage souterrain dans lequel il s’engagea, à la suite de son étrange conducteur.

Il y avait fait vingt pas à peine qu’il comprit, au bruit des voitures qu’il entendait au-dessus de sa tête, qu’il passait sous la rue qui séparait l’habitation de Villaréal du parc.

Quelques instants après, il remontèrent un escalier d’une trentaine de marches et pénétrèrent dans l’hôtel de Bedford square, par une petite porte dissimulée dans la muraille d’une salle basse des communs.

Il ne restait plus à Harris qu’à traverser la cour pour gagner le vestibule du pavillon d’habitation.

Le comte de Villaréal l’attendait dans son cabinet de travail.

— Pardon, dit-il en allant au-devant de lui, du singulier chemin que je vous ai fait prendre pour entrer chez moi ; mais il vous prouve, plus que toutes les explications, la confiance aveugle que j’ai en vous.

— Je vous remercie, comte.

— À cette heure, poursuivit Villaréal, pour tout le monde je suis rentré chez moi en voiture depuis plus d’une heure. Personne ne doit pouvoir surveiller mes sorties. Grâce à ce passage que vous avez suivi, je puis, comme vous le voyez, aller et venir sans craindre les indiscrets. J’ai fait louer au comte de Mercy le parc que vous avez traversé. Il est censé servir à l’élevage de nombreux troupeaux et j’ai seul le droit d’y pénétrer. Quant à ce passage, il n’y a que vous, Yago et moi qui le connaissons. Ceux qui l’ont creusé ne savaient ni où ni pour qui ils travaillaient.

— C’est parfait, comte, je vous que vous avez parcouru mon manuscrit.

— Je n’en ai pas passé une ligne.

— Qu’en dites-vous ?

— Que sir Arthur est bien le misérable que je supposais, et que je comprends votre haine si vous êtes lié de parenté ou d’amitié avec cet ami dont il a fait l’instrument de sa cupidité et de son infamie.

— Avec vous, comte, je ne ferai pas de diplomatie ; je vais mettre, d’un mot, ma vie et mon honneur entre vos mains. Cet Albert Moore, c’est moi !

— Vous !

— Moi-même.

— Ah ! je saisis tout alors, et je crois que nous pourrons nous entendre.

— Je le pense aussi, lorsque vous saurez surtout quelles ont été les conséquences affreuses de cette nuit horrible, conséquences que je n’ai connues que plus tard, car, frappé d’une balle bien dirigée, j’ai été plusieurs mois entre la vie et la mort.