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pierre, ce lion fantastique des Hindous, qui, couché sur ses pattes et à demi caché par les touffes de cactus et d’aloès, semblait veiller sur le champ de repos.

Arrivé là, il lui tourna le dos et s’avança en droite ligne en comptant ses pas jusqu’à cinq cents dans la direction que paraissaient indiquer les yeux du monstre.

Lorsqu’il eut fait ce trajet à travers les lianes, les ronces, dont la végétation puissante masquait les tombeaux, il aperçut à ses pieds un large mausolée qui s’était affaissé jusqu’au niveau du sol.

Il n’en restait guère que le banc circulaire brisé çà et là et une large dalle chargée d’inscriptions en prâcrit, ce qui prouvait que ce tombeau était un des plus anciens de la nécropole.

En mettant le pied sur cette dalle, Nadir reconnut, à la légère oscillation qu’elle subit, qu’elle pouvait se déplacer facilement.

Il se baissa alors, et après avoir pesé de tout le poids de son corps sur l’une de ses extrémités pour la faire balancer, il la fit tourner sans grand effort, de droite à gauche, sur les pierres où son centre reposait comme sur un pivot.

La dalle avait entraîné avec elle, dans son mouvement de rotation, un épais réseau de liane et avait démasqué un escalier rapide, dont les rayons de la lune permettaient de distinguer les premières marches de pierre à demi effondrées.

Sans hésiter, Nadir s’y engagea, et avant de disparaître, il attira violemment la dalle au-dessus de sa tête, pour lui faire reprendre sa position première.

Il était dans une obscurité profonde ; mais, comme s’il eût été sûr de son chemin, maintenant qu’il était dans les entrailles de la terre, il descendit hardiment, s’appuyant seulement à la paroi de la muraille pour ne pas glisser.

Au bout d’une vingtaine de degrés, il trouva un petit vestibule de quelques pieds carrés à peine.

En face de lui s’ouvrait un étroit et long couloir, à l’extrémité duquel brillait une faible lueur.

Il s’y engagea.

Après l’avoir parcouru, il atteignit un vaste caveau, qu’éclairait une torche de résine fichée dans la gueule de l’un des monstres qui grimaçaient au pied des colonnes monolithes qui en soutenaient la voûte.

La torche était presque entièrement consumée ; elle allait s’éteindre.

Au dernier éclat de sa lumière vacillante, Nadir aperçut, étendu sur le sol, dans un des angles de cette salle, un homme immobile et qui semblait ne plus vivre.