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Il venait d’apercevoir, sous cette voûte immense de plus de cent cinquante pieds de largeur sur une profondeur égale, deux mendiants, ou plutôt deux pèlerins couverts de poussière et qui semblaient harassés de fatigue.

Sans se presser, l’inconnu monta les degrés du temple et sans affectation, il s’approcha des deux Hindous.

Ceux-ci, en le voyant venir, échangèrent un regard rapide et tendirent les mains vers lui.

— Nous arrivons du Nord, dirent-ils à l’étranger comme pour implorer sa pitié.

— Et moi, je vais vers le Sud, répondit ce dernier en leur remettant lentement quelques pièces de monnaie.

À ces mots les deux mendiants s’inclinèrent jusqu’à terre.

Les spectateurs purent croire que c’était pour remercier le Sick de sa généreuse aumône.

— Ce soir, au coucher du soleil, auprès du mausolée de Maharadjah, poursuivit l’étranger.

— Tu seras obéi, maître, répondirent les Hindous.

Et ils se mirent en prières, pendant que celui qu’ils venaient d’appeler maître continuait de s’avancer vers la porte du temple qui venait de s’ouvrir.

Il disparut bientôt au milieu de la foule qui s’engouffrait dans les couloirs.

Aussitôt qu’ils l’eurent perdu de vue, les mendiants se relevèrent.

Leurs dévotions étaient sans doute terminées, car, après avoir parcouru la place dans divers sens, ils se dirigèrent vers la rive du Kavery au lieu de se mêler à ceux qui cherchaient à pénétrer dans la pagode.

Peu d’instant après, ils traversaient le pont qui mène à Tritchinapaly, et gagnaient, sans entrer dans la ville, la route de Tanjore, qu’ils prenaient à pied malgré l’ardeur des rayons du soleil.

Ils avaient certainement une longue marche à faire, car ils avaient ôté leurs sandales et déroulé leurs turbans dont ils s’étaient fait des ceintures.

Pendant que ces deux hommes, les pieds nus et seulement abrités par l’ombre des arbres qui bordaient la route, faisaient voler la poussière autour d’eux, l’étranger, avec une expression indéfinissable de mépris, assistait à l’oupo-pouja.

Chacune des cérémonies de la fête semblait éveiller en son âme de douloureuses pensées.

Lorsqu’il entendit le brahmine donner pour exemple aux fidèles les malheureux qui se martyrisaient sur la place publique, il fut obligé de faire un