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entendit le vieillard prôner partout son jeune ami, il se sentit envahi par mille sentiments mauvais. Puis, il eut bientôt la pensée que cet étranger pouvait aimer Marguerite et en être aimé. Il se promit alors de les surveiller et de les perdre s’il existait entre eux un secret et qu’il le surprit.

Dès ce jour-là, il redevint assidu chez son oncle, empressé auprès de Marguerite, et, quoiqu’il n’eût jamais passé pour un dilettante, il se prit tout à coup pour la musique d’un goût passionné. Il écoutait pendant des soirées entières tous les morceaux qu’il plaisait à M. Rumigny d’exécuter : lorsque la jeune fille et Balterini chantaient, car l’Italien avait une voix remarquable, il ne les quittait pas des yeux.

Se sentant espionnée, Mlle Rumigny redoubla de réserve et recommanda à Robert de se tenir sur ses gardes ; mais les deux amants eurent beau faire, M. Morin les devina, et, lorsqu’il fut bien certain qu’ils s’aimaient, il résolut de ne pas attendre un instant pour se venger.

C’est dans ce but qu’il se présenta un matin chez M. Rumigny. Celui-ci était seul dans sa salle à manger ; sa fille venait de remonter chez elle.

— Eh ! bonjour, mon neveu, dit le vieillard, quelle bonne fortune t’amène à pareille heure ?

— Je viens remplir un devoir, mon oncle, ré-