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tions ce supplice affreux de l’inaction et de l’incertitude, lorsque Canon se leva brusquement en poussant de grands cris. Il venait d’entendre sur notre droite, répétés à intervalles, des bruits réguliers qui ne pouvaient être que ceux des avirons d’un canot passant au large.

— À nous, à nous ! cria-t-il de sa voix puissante qui dominait le bruit des lames.

Je joignis mes cris aux siens sans quitter madame Lauters, qui s’était attachée à moi comme si l’instinct de la conservation lui fût subitement revenu.

Nous vîmes bientôt l’embarcation doubler la pointe à une portée de pistolet. C’était une petite pirogue montée seulement par cinq hommes que l’obscurité nous empêchait de distinguer, mais ces hommes étaient pour nous des sauveurs. Nous redoublâmes nos cris. Nous reconnûmes bientôt que nous avions été aperçus, car, venant brusquement sur bâbord, elle manœuvrait pour passer entre les récifs et le banc de sable.

Le contrebandier, dans l’eau jusqu’à la ceinture, indiquait les dangers et les endroits où elle pouvait s’engager. Grâce à sa légèreté et à son peu de tirant d’eau, elle avait heureusement franchi les premiers récifs. Encore dix coups d’avirons et elle pourrait nous recevoir !

Sir John animait les rameurs et me faisait signe de prendre madame Lauters dans mes bras si elle ne voulait pas marcher. La pirogue, debout à la lame, se laissait culer en ne nageant que de façon à