Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/413

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nous nous attendions à une décharge de la mousqueterie. Ne voulant pas commencer les premiers, nous nous étions contentés de braquer sur eux les pierriers de la dunette afin de riposter immédiatement.

Je surveillais les mouvements des soldats amassés sous le toit de jonc, lorsqu’il me sembla distinguer, auprès du to-kung[1] du bateau chinois, un grand gaillard dont la figure basanée était trop bien présente à ma mémoire pour que, même à une longue distance, je ne le reconnusse pas. Sans laisser rien voir de mon impression de terreur, je regardai plus attentivement, n’en pouvant vraiment croire mes yeux. Il venait de s’emparer d’une carabine qu’il pointait dans notre direction. Avant que j’aie pu prononcer un mot, tant ma surprise avait été grande, sa balle venait fracasser l’épaule de notre hochung, en n’obéissant probablement pas à sa volonté.

Les rêves de sir John avaient raison : cet homme était le Malabar de Tanjore ; je ne pouvais pas douter que cette pirogue qui nous suivait depuis Whampoa fût la sienne. Le misérable n’avait pas oublié les rives du Panoor. Comme nous l’avait prédit Wilson, sa vengeance nous poursuivait même au-delà de sa patrie.

Son coup de feu fut le signal d’une mousqueterie générale à laquelle vint se joindre la pièce de l’autre bateau mandarin, pointée si maladroitement que, quoique nous ne fussions qu’à une faible portée, le

  1. Timonier.