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prît garde, bercé qu’il est par les doux rêves que lui donne l’opium.

Un escalier pratiqué entre ces deux salles conduit au premier étage, occupé d’ordinaire par deux courtisanes seulement, et divisé, comme le rez-de-chaussée, en deux pièces meublées, avec le plus grand luxe, de divans, et ornées de force lanternes et stores coloriés.

Nous pénétrâmes d’abord dans la salle de jeu où une demi-douzaine de joueurs, que notre arrivée ne dérangea en aucune façon, étaient réunis autour d’une table sur laquelle un croupier faisait rouler des dés. Je compris qu’il jouait seul contre la galerie. Je doute que la société du 113 ait jamais offert, à l’observation, de plus curieux types que ceux que nous avions devant les yeux dans le tripot du Céleste-Empire.

Les enjeux étaient de petits morceaux de lingots d’or et d’argent et des piastres américaines, même des pièces françaises de cinq francs, assez dépaysées, trouées à force d’avoir été poinçonnées et rognées, et souvent, en si mauvais état qu’elles étaient enveloppées dans du papier. Les petits yeux fendus des joueurs avaient des éclairs inouïs d’avidité et d’amour du gain ; mais c’était là tout ce qui perçait à l’extérieur de leur émotion : ils étaient calmes, paisibles, parlaient à peine et jouaient vraiment comme des hommes de bon ton.

Nous n’avions en aucune façon le désir de tenter la chance, — nous savions depuis longtemps les Chinois