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Nous avions mis à peu près trois heures pour remonter les huit milles qui séparent le mouillage européen de la capitale de la province du Milieu.

Aucune description ne saurait donner une idée de cette rade qui ne ressemble à aucune des rades du monde.

L’encombrement de la Tyne à Nort-Shield, ou de la Tamise à Greenwich, ne saurait se comparer au bruit, au mouvement qui se fait devant Canton.

Le long du rivage, de French-Folly aux chantiers de construction, se balançaient lourdement des centaines de jonques de guerre avec leurs mâts énormes surmontés de pavillons de mille couleurs. La muraille et les quais disparaissaient derrière elles. Sur l’autre rive, étaient amarrés les navires de commerce. En face de nous, la petite île, où a été construit ce fort qu’on nomme Dulch-Folly, sortait comme une corbeille fleurie du milieu des eaux. Les canons de ses embrasures se devinaient çà et là à travers le feuillage, au-dessus des bateaux de fleurs qui baignaient coquettement leurs avants dorés dans les flots et semblaient une rue de quelque ville magnifique.

Il nous fallut, pour traverser la rade dans toute sa longueur, nous frayer un passage au milieu de cette foule d’embarcations de toutes les formes, de toutes les constructions, qui, chargées à couler bas de caisses de thé, de cannelle et de-sacs de riz, se dirigeaient vers le mouillage de Whampoa.