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ordinaire en deux villes. L’Asie veut bien nous vendre ses étoffes et ses produits précieux, mais elle ne veut pas vivre dans la même atmosphère que l’Europe ; elle veut dormir seule. Lorsque le moment du labeur est passé, elle s’empresse de quitter sa compagne pour rentrer dans son calme et son immobilité.

Les deux villes sont séparées, à Singapour, par une rivière à l’entrée de laquelle est un petit port inutile à cause de la bonté de la rade, et dans lequel n’entrent que les bateaux pêcheurs.

Nous fîmes armer une embarcation, et, comme nous devions, dès le lendemain, faire voile pour Canton, nous nous empressâmes de descendre à terre.

Après avoir dépassé une jetée qui ferme le port, et à l’extrémité de laquelle gambadaient, nus comme des vers, une douzaine de négrillons dont tout le métier consistait à se jeter à l’eau pour rattraper, avant qu’ils eussent atteint le fond, les sapeks que voulaient bien leur lancer les amateurs de ce tour d’adresse, nous vînmes accoster, à gauche de l’entrée, à un débarcadère qui n’est autre chose que les ruines d’une pagode. Il en reste les larges escaliers de pierre, qui servaient à conduire les fidèles dans l’eau pour y faire leurs ablutions, et deux massives colonnes monolithes qui soutiennent encore une espèce d’entablement.

Toute cette rive droite de la rivière est prise par