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pousser au large. Je n’emmenais de l’équipage du Fire-Fly que mon domestique et celui de James qui devait rester auprès de lui.

J’entendis, au moment où je passais sous le couronnement de notre gracieux smuggler, Canon qui me criait :

— Allons, bon voyage, soyez prudent, et à demain ! Je lui dis adieu de la main, et le bateau, poussé vigoureusement par ses six rameurs, s’élança à travers la flotte des bâtiments à l’ancre qu’il nous fallait traverser pour sortir de la rade. Le patron se servait à l’arrière d’un large et long aviron en guise de gouvernail, nos domestiques s’étaient couchés à l’avant ; moi, j’avais pris place sous la tente auprès de James qui semblait ravi d’aller se remettre à Chandernagor. Le pauvre diable ne devait jamais en revenir.

Jusqu’à Serampour, c’est-à-dire dans une course de cinq lieues, nous naviguâmes entre les rives les plus charmantes et les plus poétiques qu’ait jamais baignées grand fleuve aux flots écumants. Nous ne restions pas dix minutes sans croiser quelque bizarre embarcation du pays, descendant vers Calcutta ; çà et là, nous apercevions sur le rivage, alignées comme des guérites peintes en blanc, de petites pagodes abritant leurs dômes écrasés sous l’ombrage des tecks et des palmiers, et envoyant leurs larges escaliers jusque dans les eaux sacrées. Puis, nous passions sous d’épaisses voûtes de feuillage où gazouillaient