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plus belle salle, accroupi au milieu de ses amis, s’inclinant à peine devant les étrangers qui le saluent. La nuit se passe en illuminations, en festins, en réjouissances de toutes sortes. Au lever du soleil, le muzzin fait entendre sa voix traînante à la galerie des minarets, et le palais de l’Orient redevient la triste demeure, dont les murs blanchis à la chaux sont insupportables à la vue.

Plusieurs de ces Hindous dépensent ainsi près d’un demi-million chaque année pour cette seule fête du carême, tandis que le vingtième de cette somme leur suffit pour les onze autres mois.

Pendant que les Indiens musulmans ou brahmanistes vivent ainsi, les Anglais, avec la ruineuse simplicité de leur luxe, dévorent les immenses bénéfices de leurs transactions commerciales, et s’en reviennent souvent en Angleterre plus pauvres qu’ils n’en sont partis et minés par les maladies.

Je ne sais si c’est parce que les plaisirs intellectuels leur manquent, mais l’existence des officiers de la Compagnie est bien dans l’Inde la vie la plus abrutissante qu’il soit possible de mener, à l’exception toutefois de celle de quelques-uns d’entre eux qui se livrent à l’étude des langues orientales. Hélas ! la plus grande partie ne quittent les tavernes que pour les cases de Casi-Goula ou pour les petites maisons de Misseri-Gange. Non contents des vices qu’ils doivent à la mère-patrie, ils ont soin de greffer sur ceux là les autres auxquels les poussent le climat et les habitudes indiennes