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Après quelques instants, ses paupières s’ouvrirent. Ses yeux hagards se dirigèrent sur chacun de nous, mais sans nous reconnaître. J’imbibai d’eau un linge que je lui étendis sur le front, je lui frottai les mains et les poignets pour activer la circulation du sang. Bientôt un triste sourire qui parut sur ses lèvres vint nous dire qu’elle reprenait ses esprits. Cependant, malgré la pesanteur de l’atmosphère, tout son corps était glacé. Je l’enveloppai dans une couverture et nous la portâmes doucement dans mon palanquin. Pour moi, la pauvre enfant, pour être revenue à la vie, n’en était peut-être que plus près de la mort. La secousse avait été trop violente, je n’osais conserver l’espoir de la sauver. Ses lèvres et ses narines avaient une teinte bleuâtre dont je ne pouvais me rendre compte ; ses petites mains crispées se portaient toujours à son front, comme s’il eût été le siège du mal qui la tuait.

Le houkabadar qui avait, comme moi, remarqué ces taches bleues, avait disparu depuis un instant derrière le palanquin où, pendant la lutte contre les thugs, reposait la bayadère, de cet étrange et profond sommeil qui m’avait frappé.

Tout à coup il revint vers nous, l’œil hagard, les lèvres tremblantes, tenant dans ses mains des feuilles, des fleurs et des baies d’un rose vif. Je ne fis qu’un bond jusqu’à lui, et je ne pus retenir un cri de désespoir. Goolab-Soohbee, dont le ravisseur n’avait voulu que rendre plus profond le sommeil afin