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Son sourire allait, ironique, d’un templier barbu et bardé de fer à un élégant chevalier de Saint-Louis, et d’une chanoinesse au front sévère à la belle Thérèse de Blangy-Portal, l’une des reines de Versailles sous Louis XIV, et peut-être pensait-il avec orgueil que sa famille à lui, malgré ses pérégrinations à travers le monde, malgré les persécutions et les exils, était autrement ancienne et pure de tout mélange que celle de son débiteur, lorsque celui-ci parut et lui dit :

— Bonjour, monsieur Blumer, je suis enchanté de vous voir aujourd’hui. J’allais vous écrire ou envoyer chez vous.

Et faisant signe à son visiteur de reprendre le siège qu’il avait quitté, il se laissa tomber dans un fauteuil, en lui demandant :

— Prendrez-vous du café avec moi ?

— Tous mes remerciements, monsieur le duc, je sors de table, répondit respectueusement l’usurier.

— Alors, un cigare et un verre de fine champagne ?

— C’est trop d’honneur !

Cette réponse n’empêcha point Isaïe de choisir avec soin dans la boîte que lui présentait Germain et de goûter en gourmet au cognac que le vieux serviteur lui avait versé.

Puis, dès qu’il fut seul avec M. de Blangy-Portal, il lui dit :

— Je suis ravi, monsieur le duc, que ma visite ne vous contrarie pas trop. Elle est, hélas intéressée. Ainsi que je le craignais, le porteur de votre traite de trente mille francs qui échoit demain m’en a refusé le renouvellement : mais je vois à l’accueil que vous daignez me faire que vous êtes en mesure.