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Arrivé devant l’hôtel de sa maîtresse, Robert sauta à terre, sonna, puis, au domestique qui vint ouvrir aussitôt :

— Madame est là ! demanda-t-il.

— Non, monsieur le duc, répondit cet homme, madame est partie il y a près d’une heure.

— Comment, partie ! Vous voulez dire : sortie ?

— Non, partie ! Madame a emporté deux valises et M. Schumann est monté sur le siège du coupé qui est allé conduire madame aux avant-postes. Mais madame m’a recommandé de dire à monsieur le duc qu’elle a laissé une lettre pour lui sur la cheminée du boudoir.

M. de Blangy-Portal ne voulut pas en entendre davantage ; il gagna rapidement, au premier étage, le petit salon, qui était séparé de la chambre à coucher de l’Américaine par une glace sans tain, garnie d’un store.

La lettre dont le valet de pied venait de parler était en effet sur la cheminée, bien en évidence.

Robert s’en saisit, déchira l’enveloppe et lut :

« Mon cher ami, tu ne m’en voudras pas trop de ne point avoir eu l’héroïsme des Parisiennes et d’aller me reposer un peu, en pays plus calme que la France, des émotions que j’éprouve depuis près de trois mois.

« Si je ne t’ai pas fait part de ma résolution de quitter Paris, c’est qu’une scène d’adieux aurait été trop pénible entre nous. J’ai préféré nous l’épargner à tous deux.

« Mais, après la guerre, qui va bientôt finir, il faut l’espérer, nous nous reverrons, et si, toi, tu m’aimes seulement encore un peu, tu me retrouveras, moi, t’aimant toujours beaucoup.