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Portal mena pendant quelques années une vie relativement sage.

Il avait épousé une jeune fille de son monde, Mlle Anne de Pressençay, de l’une des plus illustres familles d’Anjou, était devenu père d’un fils, et au moment où le chef de la maison rendit son âme à Dieu, en laissant plus de deux cent mille livres de rente, son fils n’avait pas encore atteint sa trentième année.

Ainsi que l’avait été le duc défunt, c’était un homme entier, violent, que le despotisme paternel avait humilié et, de plus, d’un tempérament ardent, porté au plaisir, que le calme du foyer conjugal n’avait pas éteint, tout au contraire.

Femme d’une santé délicate, d’une nature aimante et timide, la jeune duchesse avait fréquemment souffert du caractère de son mari. Elle avait pressenti que, dès qu’il serait libre, il prendrait en quelque sorte sa revanche de la contrainte dans laquelle il vivait, et elle eut bientôt la preuve douloureuse qu’elle ne s’était pas trompée, car moins de six mois après la mort de son père, Robert, jetant tout à fait le masque, prenait place parmi les grands clubmen de Paris.

Si résignée qu’elle fût par avance, Mme de Blangy-Portal éprouva la plus grande douleur de cette transformation qu’elle avait cependant prévue, et elle chercha dans l’accomplissement de ses devoirs de mère un soulagement à son désespoir d’épouse, mais frappée au cœur, elle ne tarda point à tomber gravement malade, et bientôt elle ferma les yeux, sans faire entendre une parole de reproche.

Ses derniers mots à celui dont les désordres et l’abandon avaient hâté sa fin furent ceux-ci :