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gant fumoir et posé sur une table la lampe qu’il avait apportée du vestibule, après l’avoir remontée.

— Donnez-nous du sherry et des cigares, commanda le duc.

Le vieux serviteur plaça sur un guéridon ce qui lui était demandé et se retira.

Robert de Blangy-Portal et Paul Guerrard étaient seuls.

Bien que ses traits fussent tirés et que quelques rides se montrassent ça et là sur son front, le premier de ces hommes avait trente-cinq ans à peine.

De taille élevée, élégante, il affectait en public la raideur britannique, mais il était au contraire plein de laisser-aller dans l’intimité, ce qui faisait parfois un contraste étrange, presque pénible.

On eut dit qu’il portait une espèce de masque, tant son visage changeait aisément d’expression selon les milieux où il se trouvait.

Dans le monde, on devait le croire correct en tous points, malgré son sourire moqueur et le clignotement de ses paupières fatiguées, mais au club et chez certaines femmes, où la dissimulation lui semblait inutile, tout en lui trahissait le viveur sceptique et vicieux.

Guerrard avait à peu près le même âge que Robert, et c’était un beau cavalier dans l’acception la plus complète du mot. Moins distingué de tournure que son noble ami, il était loin cependant d’être commun. Il avait des yeux superbes, le front large, la physionomie intelligente, ouverte, sympathique.

C’était de plus un garçon spirituel, plein d’entrain et fort érudit, car il avait débuté dans la vie par être