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les terreurs folles qui l’envahissaient dès que la nuit était venue et qu’elle n’avait personne auprès d’elle.

Pour fuir l’isolement, elle avait rouvert sa porte à quelques vieux amis, mais, pour rien au monde, elle n’aurait osé s’aventurer dans son parc, du côté du kiosque. Elle craignait même à ce point d’en apercevoir le toit de tuiles rouges, à travers les arbres dépouillés par l’automne, qu’elle avait abandonné sa chambre à coucher, qui donnait sur le jardin, pour s’installer sur le devant de l’hôtel.

De plus, elle faisait dormir, dans une pièce voisine, à la portée de sa voix, cette vieille femme de chambre, Julie, qui était à son service depuis plus de quinze ans et qui, seule de ses gens, savait que Claude était sa fille.

Toutes ses précautions contre la peur que prenait Mme Frémerol inquiétaient Guerrard au lieu de le rassurer ; il craignait que la malheureuse ne se trahît dans une de ces hallucinations qu’elle avait tout éveillée. Aussi venait-il la voir presque tous les jours et la surveillait-il attentivement. Mais à sa surprise, quand, pour calmer ses nerfs, il voulut, un matin, lui rédiger une ordonnance, elle s’y opposa, en disant avec une extrême vivacité :

— Je vous suis reconnaissante, mais laissez-moi consulter mon médecin. Ici, vous n’êtes et ne devez être qu’un ami !

— Vous n’avez pas confiance en moi ? fit Paul en riant.

— Oh ! je ne dis pas cela, mais mon vieux docteur Marceau m’en voudrait beaucoup si je recevais d’autres soins que les siens. Vous êtes mon ami, notre