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pour qu’ils arrivent tout entiers à ta chère petite fille, lorsque je ne serai plus !

— Mère chérie ! Mais tu es aussi jeune que moi. Et vois-tu, le mieux encore pour nous deux, ce serait que je me séparasse complètement de M. de Blangy-Portal.

— Tu tenterais en vain d’y parvenir. Son inconduite n’est pas de celles que le Code considère comme un motif suffisant pour obtenir un jugement contre un mari.

— Comment, son abandon, ses relations, connues de tout le monde, avec une fille ; le gaspillage de ma fortune ?

— Tout cela n’est rien, selon la loi… que les hommes ont faite ?

— Ainsi, pendant que le duc aura des maîtresses, je serai condamnée, moi, à une existence d’isolement, au veuvage. Et si mon cœur venait à battre, si j’étais aimée et si j’aimais ?

— Alors il aurait sur toi, en quelque sorte, le droit de vie et de mort, et, s’il n’usait pas de ce droit, il ferait prononcer votre séparation à son profit et garderait sa fille.

— Mais tout cela est horrible !

— Ma chère Claude !

Mme Frémerol l’avait prise entre ses bras et s’efforçait de la rassurer par de douces paroles.

Si inconscientes qu’elles fussent encore, les aspirations de cette belle créature de vingt ans à l’amour l’épouvantaient, car, ne pouvant plus douter du cynisme de son gendre, elle se demandait s’il ne serait pas assez infâme un jour pour spéculer sur les