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Interprétant donc dans tout autre sens le silence de sa fille, Geneviève n’osa insister, mais on comprend dans quelle tristesse la journée se termina pour ces deux cœurs meurtris.

Lorsque le moment de partir fut venu pour Claude, sa mère s’efforça cependant de paraître croire, comme elle, qu’il ne s’agissait de la part de son mari que d’une fantaisie qui n’aurait pas de durée ; mais quand elle se retrouva seule, elle se laissa aller à un véritable désespoir.

Cette déception que lui causait la conduite de M. de Blangy-Portal la surprenait dans un état d’esprit qui la disposait à envisager encore plus gravement les choses.

À la pensée que si le drame de la rue de Prony était un jour découvert, sa fille serait à la merci de cet homme qui, après moins de deux ans de mariage, la trompait sans se rappeler qu’il lui devait d’avoir échappé à la ruine, aux humiliations des poursuites de créanciers impitoyables, à une véritable misère enfin, elle éprouvait une horrible douleur.

— Claude ne sera pas même défendue, pensait la pauvre mère, par cette affection conjugale et ce respect qui, à défaut d’amour, commandent au mari de protéger sa femme.

Que deviendra-t-elle alors ? Quelles tortures morales le duc ne lui infligerait-il pas pour se venger de la honte qui rejaillira sur elle, et par conséquent sur lui, quand on saura que la duchesse de Blangy-Portal est la fille de la Frémorol, l’ancienne maîtresse d’Adolphe Berquelier, la femme de Jean Mourel le forçat, de Jean Mourel, qu’elle a tué !