Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

suites. Ils n’avaient été que des complices absolument inconscients.

Quant à Mme Mourel, elle s’était réfugiée chez sa tante pour ne plus habiter sa petite maison payée avec le produit d’un crime. De plus, malgré toutes les supplications de son mari, elle avait refusé d’aller le voir à la prison.

« — Je ne vous aimais pas lorsque vous m’avez épousée, lui écrivit-elle, mais j’étais une honnête femme et je croyais sincèrement que mon affection serait le résultat de notre existence commune. « Bien certainement il en aurait été ainsi, je le sentais peu à peu, mais ce qui se passe a fait disparaître tous mes bons sentiments pour vous. Je n’ignore rien de la vie que vous meniez à Paris pendant que vous me laissiez seule, remplie de confiance en votre amour. Tout en souhaitant que vos juges vous soient indulgents, vous n’existez plus pour moi. »

À la lecture de ces lignes, le faussaire fut pris d’un véritable accès de rage. Il comprenait que l’abandon de sa femme, dont la lettre serait jointe au dossier, produirait un effet désastreux sur le jury, et il fit le serment de se venger tôt ou tard.

Toutefois il se garda bien de lui écrire dans ce sens, car il espérait qu’elle assisterait aux débats et reviendrait, par pitié, à de meilleures pensées, mais ce dernier espoir fut déçu. Rose ne parut devant la cour que juste le temps nécessaire pour y déposer, ce qu’elle fit avec modération, mais aussi avec une douleur qui impressionna vivement les jurés, et le président l’autorisa aussitôt à se retirer.