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tait dans le train de Mantes de onze heures dix, en compagnie du docteur, qui avait jugé prudent de ne pas la laisser retourner seule à Verneuil. Elle était dans un tel état nerveux qu’elle se serait aussitôt trahie devant sa fille.

Or ne fallait-il pas que la duchesse Claude ignorât toujours ce drame sanglant, qui venait de se jouer par amour pour elle !

En traversant le quai pour monter en wagon, ni Guerrard ni Geneviève n’avaient remarqué un individu, petit, d’apparence chétive et les yeux abrités derrière des lunettes bleues, qui était passé près d’eux en courant, pour se blottir dans un compartiment de troisième classe, au milieu d’une foule d’émigrants se rendant au Havre.

Cet individu était tout simplement l’honnête Charles Durest.

Après avoir mis entre lui et l’endroit où gisait le corps de Mourel une distance prudente ; il s’était arrêté sous un bec de gaz, s’était assuré que personne ne le voyait, avait tiré de sa poche la montre du mort, l’avait consultée et s’était dit à lui-même, avec un sourire de satisfaction :

— Elle doit aller à merveille, car ce brave Jean avait pris en Amérique des habitudes d’ordre. J’ai juste temps de partir ! On ne sait ce qui peut se passer. L’alibi, l’alibi ! Il n’y a que ça… et les femmes !

Et il avait descendu au pas accélère la rue de Saint-Pétersbourg, pour gagner la gare Saint-Lazare.

Vers quatre heures du matin et bien que son billet lui donnât le droit de se rendre jusqu’au Havre, notre personnage, le chapeau sur les yeux et le collet