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êtres aimés dont je suis séparé depuis tant d’années.

Le mari de Rose avait débité tout cela avec un tel accent de vérité que si le pauvre Rabot eût été encore de ce monde et l’eût entendu, il aurait tressailli d’admiration.

Les deux pêcheurs, gens simples, se contentèrent de répondre au faussaire, pseudo-condamné politique, en lui tendant leurs mains loyales.

Quatre mois plus tard, sans que les autorités anglaises se fussent inquiétées de lui un seul instant, aucun évadé n’ayant été réclamé par la Guyane française, William Dickson s’installait à Georges-Town, après avoir généreusement récompensé les frères Welter, et, libre alors de revenir au passé, il écrivit à Reims, poste restante, à Durest.

La réponse de l’ex-clerc d’huissier se fit attendre près d’un an, mais quand elle lui arriva enfin, Mourel n’en put vouloir de ce retard à son ami, qui lui écrivait :

« Mon brave Jean, quelle bonne nouvelle tu m’apprends, et comme je regrette qu’elle ne me soit pas parvenue plus tôt ! Ce n’est certes pas de ma faute !

« En sortant de Clairvaux, en 1888, je suis bien allé à Reims, par autorisation spéciale, mais je n’y ai trouvé qu’une condition si misérable — le souvenir de notre affaire était encore trop vivace — que j’ai demandé mon changement de résidence. On me l’a accordé et je suis au Havre chez MM. Oulmann et Cie, agents maritimes allemands, où je me perfectionne dans le charabia d’outre-Rhin, que j’avais commencé à apprendre à Reims, avec nos cama-