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nade ni le soir à table, il ne fut plus question entre elles de M. de Blangy-Portal. Ce fut seulement au moment où Claude vint l’embrasser, avant de monter dans sa chambre, que Geneviève lui dit :

— Souviens-toi de ta promesse. Pense à tout ce dont nous avons parlé, et… pense aussi un peu à moi.

— Oh ! c’est surtout à toi que je m’efforcerai de ne pas trop penser, car si j’y pensais seulement un peu, demain matin je te dirai non, non, cent fois non !

Et donnant à sa mère un dernier et fiévreux baiser, la jolie enfant courut s’enfermer dans son appartement, pour songer à ces événements si graves qui pouvaient changer complètement sa vie.

Depuis deux ans à peu près, c’est-à-dire depuis l’époque où elle avait commencé à s’interroger, Claude s’était sentie enveloppée d’une sorte d’atmosphère mystérieuse qui parfois la troublait.

Pourquoi, au couvent, ne parlait-on de sa mère qu’en l’appelant sa marraine, bien que la supérieure des Visitandines n’ignorât pas certainement les liens qui les unissaient ?

Pourquoi n’était-elle jamais allée à Paris et ne lui avait-on jamais parlé de son père ? Comment se faisait-il qu’elle eût pour grand’tante une femme aussi simple, aussi bourgeoise que Mme Ronsart, tandis que sa mère, la nièce de cette même tante, était si élégante et si riche ?

D’où pouvait donc venir cette fortune énorme qui lui donnait cinq millions de dot et dont elle était l’unique héritière ?

Elle s’était demandé souvent toutes ces choses,