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passer ainsi, exclama madame Berthier ; c’est une infamie, nous plaiderons ! On a abusé de la faiblesse d’esprit de mon frère.

— Madame, hasarda Me Duchemin, je regrette d’être obligé de vous dire qu’il n’y a pas là matière à procès. Mon client, M. Morin, a eu la plénitude de ses facultés jusqu’au dernier moment de sa vie, et je vous affirme que ceux de ses parents qui l’ont veillé à son lit de mort sont incapables de ce dont vous les accusez. La preuve de leurs sentiments généreux, c’est qu’ils m’ont chargé de vous offrir cinquante mille francs à titre d’indemnité. Je suis prêt à vous compter cette somme. Quant aux vingt mille francs que mon collègue de Paris vous a remis, ils sont bien à vous, je ne songe pas à vous les réclamer. C’est moi qui ai commis la faute, c’est à moi d’en supporter la conséquence.

Le digne Me Duchemin était certes sincère en faisant à madame Berthier ce véritable cadeau, mais nous devons ajouter qu’il espérait bien un peu, in petto, que les héritiers de M. Morin ne laisseraient pas à sa charge ce déboursé considérable.

D’ailleurs, il était résigné à ce sacrifice, et il avait conservé, comme péroraison, cette dernière fiche de consolation, pensant qu’elle serait irrésistible.