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selle Berthier n’a eu sous les yeux que de mauvais exemples. Lorsque le malheureux Berthier est mort dans mes bras, faisant de moi son exécuteur testamentaire et le tuteur de sa fille, nous étions dans les mers de Chine, et Gabrielle, qui avait quinze ans, était malheureusement une des plus belles jeunes filles qui se pût voir. Quand je la retrouvai, disposé à tenir mon serment, c’est-à-dire à veiller sur elle et à en faire une honnête femme, il était trop tard : sa mère l’avait perdue ; non pas certes que madame Berthier ait livré ou mal conseillé sa fille, mais elle s’est tue, et Gabrielle, d’une imagination exaltée et d’un tempérament de feu, est devenue ce que vous savez. Elle eût pu faire pis encore ! Quel rôle me restait-il à jouer ? Rendre mes comptes à madame Berthier et abandonner l’enfant de mon ami ? Je n’ai pas eu le triste courage de cette dernière action, et, par affection autant que par pitié, j’ai continué à voir Gabrielle. Je n’ai pas eu tout à fait tort, puisque cela me permet de me placer entre deux hommes qui ne se connaissaient pas hier et sont prêts à se tuer aujourd’hui. Vous ne savez pas, monsieur, tout l’entraînement du milieu parisien, où madame Berthier a commis l’impardonnable faute d’élever sa fille !