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Tout cela flattait l’amour-propre des Meyrin, et leur intérêt y trouvait son compte. Aussi Mme Frantz se gardait-elle bien de chercher à en savoir plus qu’on ne lui en disait sur les relations de la princesse et de son beau-frère. Le but de Lise Olsdorf était atteint.

En agissant ainsi, la fille de la comtesse Barineff ne faisait que céder au sentiment qui entraîne la plupart des femmes dévouées et vraiment aimantes à se rapprocher de la famille de ceux qui leur sont chers. Il leur semble qu’en ne restant pas étrangères à l’existence régulière de l’amant, à ses affaires, à ses travaux, elles sont mieux et plus que des maîtresses. C’est pour elles une sorte de consécration, de réhabilitation. Elles se sentent moins déclassées, moins isolées, armées, pour ainsi dire, d’un droit.

Leur affection s’en accroît d’autant, car elles peuvent ainsi, comme des compagnes légitimes, partager les peines et les joies de celui qui les estime assez pour ne pas faire d’elles que des instruments de plaisir. Elles deviennent en quelque sorte des épouses morganatiques auxquelles il ne manque que le nom, et qui souvent ne méritent pas moins d’égards et de respect que si elles le portaient.

Bientôt il ne se passa plus une seule semaine sans que la princesse reçût les Meyrin ou sans qu’elle fût invitée chez eux. Elle y arrivait toujours les mains pleines, saisissant les moindres occasions : fêtes et anniversaires, pour faire des cadeaux à chacun des membres de la famille.

Paul, lui, elle le voyait tous les jours, d’abord à son atelier, où elle posait pour le tableau qui la représentait à demi nue, en Diane chasseresse, toile qui paraissait devoir être une des meilleures de l’artiste, bien que les séances qu’il y consacrait fussent parfois interrompues brusquement et remises au lendemain.

Le soir, les deux amoureux dînaient ensemble et allaient au théâtre, pour en sortir bras dessus, bras dessous, sans se soucier de l’opinion publique, que les chroniqueurs des soirées parisiennes avaient nettement fixée sur la nature