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tous les jours. Au lieu de nous fâcher, restons bons amis. Ça ne pouvait pas toujours durer, n’est-ce pas ? Du reste, je devais te l’apprendre bientôt : je vais me marier.

— Te marier ! fit, en haussant les épaules, Sarah, qui ne croyait pas à ce nouveau mensonge. Te marier ! Avec ta princesse peut-être ? Tu n’es qu’un misérable ! Je te le jure, ta grande dame entendra parler de moi. Adieu !

Et, ouvrant brusquement la porte de l’atelier, elle s’élança dehors.

— Ouf ! s’écria Meyrin en se laissant tomber sur son divan. C’est fini ! J’aime mieux ça !

Il se releva tout à coup, le front soucieux et en murmurant :

— Oui, mais l’autre, que lui dirai-je ce soir ? Ah bah ! je trouverai bien le moyen de la calmer.

Ce moyen, la princesse devait même éviter à son amant la peine de le chercher, car lorsqu’il vint la rejoindre pour dîner, alors qu’il était fort embarrassé et craignait quelque reproche, elle lui dit tendrement :

— Un seul mot, ami, à propos de la rencontre que j’ai faite dans ton atelier. Jure-moi que cette fille n’est plus rien pour toi, que tu ne la recevras ni ne la reverras jamais ? C’est tout ce que je te demande.

— Je te le jure, répondit le Roumain, heureux d’en être quitte à si bon marché.

— C’est que, vois-tu, poursuivit le jeune femme, il ne faut pas qu’il y ait entre nous l’ombre d’un nuage, le moindre soupçon. Ton passé ne me regarde pas, mais ton présent est à moi tout entier ; tout entier, n’est-ce pas ?

— Tout entier ! répéta Paul, en attirant Lise sur son cœur.

Deux heures après, l’artiste, la princesse à son bras, gravissait le grand escalier de l’Opéra et prenait place dans le fond de sa loge.

Sarah, sans doute, n’avait pas perdu son après-midi, car immédiatement vingt lorgnettes se braquèrent sur eux ; le nom de la grande dame russe courut de fauteuil en fauteuil et, le lendemain, deux ou trois journaux du