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Elle s’était élancée au cou de Paul qui, sans la repousser, ne savait que lui répondre. Cependant, il était devenu si rouge et si visiblement embarrassé que le modèle ajouta aussitôt :

— On dirait que je te gêne !

— Non, bégaya-t-il. Es-tu folle ! Mais…

— Mais quoi ? Voyons, parle. Ah ! ce portrait ! Qui est-ce ?

Jusqu’alors le portrait de Lise Olsdorf était resté chez Frantz Meyrin. Par prudence justement, Paul l’y avait laissé. C’était seulement depuis la veille qu’il l’avait fait apporter à son atelier.

— C’est la princesse Olsdorf, répondit-il ; une grande dame russe dont le mari a été charmant pour moi à Saint-Pétersbourg.

— Tu ne m’en a jamais parlé. Pourquoi ? Où était donc cette toile ?

— En Russie. Elle m’est arrivée hier pour que j’aie le temps d’y travailler encore avant l’exposition.

 — Elle est jolie cette femme-là !

— Oui, pas mal !

— C’est sans doute avec le prix de ce portrait que tu as acheté toutes ces belles choses !

— J’ai fait là-bas une demi-douzaine de portraits qui m’ont été très bien payés.

Il entendit au même instant le bruit d’une voiture s’arrêtant devant la maison.

Bondissant à la fenêtre, il reconnut le coupé de la princesse.

Revenant alors vivement à la jeune fille qui, le sourcil froncé, comme dans un pressentiment jaloux, contemplait le portrait de l’étrangère, il lui dit :

— Ma petite Sarah, si tu veux être bien gentille, tu vas t’en aller. Voici des visiteurs, et il est préférable qu’ils ne voient pas ici une aussi jolie personne que toi.

— Pourquoi cela ? répondit sèchement le modèle. Est-ce que Carolus et Henner me renvoient lorsqu’ils reçoivent quelqu’un !

— Je ne te renvoie pas ; je te prie simplement…