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coquette qui se moquait de lui, Meyrin résolut de brusquer les choses.

Le hasard allait lui en fournir l’occasion plus tôt qu’il ne l’espérait : le jour même !

En effet, vers six heures, au moment où les quelques amis restés au château remontaient dans leurs appartements pour y changer de toilette, l’artiste aperçut la princesse qui, traversant le parterre, se dirigeait lentement vers une des grandes allées du parc.

Cinq minutes plus tard, après avoir fait un assez long détour, et comme s’il venait du dehors, il se trouva en face de Lise.

Elle marchait la tête baissée, en repoussant du bout de son ombrelle les feuilles mortes que le vent avait enlevées aux chênes dont les branches puissantes se réunissaient en voûte épaisse et mystérieuse.

Au bruit des pas du peintre, elle leva les yeux.

— Vous ! dit-elle d’une voix ironique ; alors, vous êtes aussi bon coureur qu’excellent cavalier ?

— Je ne comprends pas, fit Paul en s’inclinant.

— C’est que vous ne voulez pas comprendre. Il y a quelques instants à peine, en descendant le perron, je vous ai reconnu à l’une des fenêtres de la salle d’armes. Il a donc fallu que vous fassiez diligence pour être ici en même temps que moi qui viens tout droit du château, tandis que vous avez l’air, vous, de revenir du fond du parc.

En voyant sa ruse découverte, le beau Roumain ne put s’empêcher de rougir un peu ; mais il se remit bientôt, pour répondre franchement :

— Eh bien ! oui, vous avez raison, madame, ce n’est pas le hasard qui m’a conduit ici, près de vous. Depuis plusieurs jours, je cherchais vainement à vous parler, et comme vous paraissez me fuir, je me suis permis de vous rejoindre.

Après avoir hésité un instant et esquissé même un mouvement pour retourner sur ses pas, la fille de la comtesse Barineff, avec un geste de résolution, reprit sa promenade.

Meyrin marchait auprès d’elle.