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l’ont possédée, le front de la divorcée ne doit pas rougir ! Et son cœur de mère, lorsqu’il lui fait en faire deux parts, une pour ceux qui ne sont plus à elle, même de nom, une pour ceux qui viennent, croyez-vous que ce cœur ne saigne pas à en mourir ? Si ma fille se marie, qu’elle ne puisse pas divorcer, je vous en conjure !

— Ma chère enfant, répondit Mme Podoï, s’efforçant de sourire, d’abord je te promet de suivre tes instructions en tous points ; mais pourquoi regarder si loin dans l’avenir et désespérer ? Sois-en certaine, tu reviendras à la santé ; Marie n’aura pas besoin d’une seconde mère ; tu seras là pour veiller sur elle, en sortant de nouveau vaillante et belle, de tes douloureuses épreuves. Tu n’es plus seule ; Alexandre et Tekla vont arriver, et, qui le sait ? cela ne se voit-il pas tous les jours, ton mari honteux et repentant te reviendra peut-être bientôt.

À cette dernière phrase qu’elle savait ne pouvoir exprimer la vérité, Lise eut comme un frisson d’horreur et, d’une voix étrange, elle reprit :

— Mon mari, ne m’en parlez jamais ! Quant à vos espérances, ce ne sont que des rêves. Oui, si le ciel m’en donne le temps, je reverrai Alexandre et Tekla, puisque celui que j’ai trompé à pitié de moi ; mais ce sera trop tard. J’ai vécu pour la passion, je meurs d’amour maternel. Dieu est plein de miséricorde dans sa justice !

En prononçant ces derniers mots, elle ferma les yeux. Lorsqu’elle les rouvrit après quelques instants, elle reconnut Mme Daubrel qui s’était approchée doucement de son lit :

— Tenez, dit-elle alors à sa mère, en lui désignant son amie d’un regard chargé de reconnaissance, voici mon ange gardien. Depuis quatre mois, elle ne m’a pas quittée. C’est à elle que je dois d’avoir vécu assez longtemps pour vous revoir.

La générale tendit la main à Marthe, mais sans prononcer une parole, car elle sentait que les sanglots l’empêcheraient de parler. Elle connaissait déjà la jeune femme par ce que sa fille lui en avait dit à Pampeln et par les lettres si touchantes qu’elle avait