Ces mots tracés, elle sonna, donna l’ordre à la domestique venue à son appel de mettre ce billet dans la chambre de M. Meyrin, qu’elle n’avait pas vu de la journée et qu’elle savait ne pas devoir revenir pour le dîner ; elle lui avait entendu dire la veille qu’il allait à l’exposition d’Amiens.
Au même instant, Mme Daubrel entra.
— C’est Dieu qui vous envoie. Tenez, lisez.
Elle lui présentait la lettre de la générale Podoï et la dépêche de Véra.
— Pauvre amie, dit Marthe ; qu’allez-vous faire ?
— Je vais partir pour Pampeln.
— Pour Pampeln ! Vous ?
— Oui, moi ! Le prince en est absent et je ne veux pas que mon fils meure ! Je sens que je le sauverai.
— Mais votre mari ?
— Je n’ai plus de mari, je n’ai que des enfants ! Vous, n’est-ce pas, pendant mon absence, vous veillerez sur ma fille ? Je vous en prie !
— Je vous le promets ; je vous le jure ! elle sera la mienne.
Mme Daubrel n’avait pas le courage de combattre la résolution de la malheureuse. Dans son amour maternel si éprouvé, elle la comprenait trop bien.
— Alors, poursuivit Mme Meyrin, aidez-moi ! Oh ! ce ne sera pas long. Je n’ai pas un instant à perdre. Le train de Berlin part à huit heures ; je veux le prendre.
En effet, moins d’une demi-heure plus tard, après avoir jeté au hasard dans une valise les objets indispensables et envoyé une dépêche à Pampeln pour lui annoncer son arrivée, Lise était prête.
— Adieu, dit-elle à son amie, en mettant entre ses bras sa fillette qu’elle couvrait de baisers et baignait de ses larmes ; adieu, priez pour mon fils !
Quelques instants après, seule, sans serviteur, le voile baissé sur son visage comme une fugitive, l’ex-princesse Olsdorf montait dans une voiture de place, en donnant l’ordre au cocher de la conduire à la gare du Nord.