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s’il éprouvait le besoin de s’excuser, qu’elle ne pouvait avoir l’ombre d’un soupçon.

Si les choses en étaient restées là, les écarts du peintre n’eussent été que des péchés véniels, mais il ne devait pas tarder à aller plus loin. Une après-midi, chez un artiste de ses amis, Robert Aubrey, qui avait été l’un des assidus à ses réceptions, il se trouva tout à coup en face de Sarah Lamber. Elle posait à demi nue pour une Phryné que le maître de l’atelier devait exposer au prochain salon.

Le frère de Frantz n’avait pas revu la belle juive depuis le jour où, rompant brusquement avec elle, il l’avait sacrifiée à la princesse Olsdorf, au moment de l’arrivée de celle-ci à Paris.

On sait comment Sarah Lamber s’était vengée, en adressant au prince Pierre cette dénonciation appuyée par vingt articles de journaux qui étaient venus le surprendre à Pampeln dans sa toute confiance en sa femme. Mais cet acte odieux avait tourné à la confusion de l’ancienne maîtresse du Roumain, puisqu’il en était résulté, au lieu du drame sanglant qu’elle espérait peut-être dans sa colère, le divorce de la princesse et son mariage avec son amant, c’est-à-dire le bonheur pour tous deux. Elle devait le penser du moins.

À la suite de cette déception, Sarah, furieuse de son insuccès, s’était bien gardée de se vanter de ce qu’elle avait fait ni de parler jamais de l’infidèle, sinon pour l’applaudir de n’avoir plus de rapports avec un homme comme lui : un peintre sans talent, sans esprit, sans avenir, bon tout au plus à être le mari d’une femme chassée par son époux ; et elle avait évité d’aller dans les endroits publics tels que les théâtres, où elle aurait pu le voir.

Cependant, quelque indifférence qu’elle affectât lorsqu’on parlait en sa présence du ménage de la rue d’Assas et de ses charmantes réunions, elle se souvenait toujours de son ancien amant, car elle l’avait beaucoup aimé ; et quand elle entendit raconter, dans les ateliers où elle posait, que Paul visitait souvent plusieurs de ses vieux