Elle ne voulait donc commettre aucune imprudence et, de nouveau, la maîtresse fit en elle place à la mère. Elle commença par s’abstenir de se montrer au théâtre, puis, peu à peu, elle rendit ses réceptions moins fréquentes, plus brèves, jusqu’au jour où elle mit de côté tout ce qui ne se rapportait pas absolument à celui qu’elle attendait. Bientôt, elle ne reçut plus guère que les Meyrin, Mme Daubrel et Dumesnil, ce dont Paul sembla ravi. On eût dit qu’il était enchanté de ne plus voir sa femme aussi entourée que depuis son mariage, et comme il n’en passait pas moins presque tout son temps auprès d’elle, Lise, convaincue que son mari l’aimait davantage chaque jour, se trouva plus heureuse que jamais.
Deux mois plus tard, Mme Meyrin mit au monde une fille à laquelle on donna le nom de Marie et que le peintre, à la suggestion de sa belle-sœur, conseilla à sa femme de nourrir.
Lise n’y avait jamais songé, cela étant entièrement en dehors des mœurs du monde où elle avait toujours vécu, mais elle adopta néanmoins avec joie cette idée, d’abord pour plaire à son mari, et ensuite parce qu’il lui semblait qu’allaité par elle-même, son enfant lui appartiendrait plus encore.
Elle ne pensa pas une seconde à l’esclavage de chaque instant auquel elle se condamnerait, ni aux sacrifices de toutes sortes que lui imposerait son rôle de mère aussi complètement accepté.
La vérité, c’est que Paul saisissait avec empressement cette occasion de faire un premier pas, sans discussion, sans même avoir l’air d’y être pour rien, vers ces réformes dont Barbe ne cessait de lui parler lorsqu’il se trouvait seul avec elle, éveillant la jalousie et le rappelant aux principes d’économie dont il avait toujours eu l’exemple sous les yeux depuis son enfance.
— Quand une femme devient mère de famille, lui répétait-elle, il faut qu’elle dise adieu à la coquetterie et aux hommages toujours intéressés des adorateurs. Lise est beaucoup trop élégante avec ses cheveux à demi épars, ses toilettes luxueuses, ses corsages décolletés, ses bas