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vers les vitraux de couleur des grandes fenêtres ogivales, ce silence lugubre qui régnait autour d’elle, tout cela causa brusquement à Véra une telle épouvante qu’elle s’enfuit affolée jusqu’à l’appartement qui devait être le sien, d’après ce que lui avait dit Yvan.

Voisin de celui qu’habitaient le fils de Pierre et sa gouvernante, Mme Bernard, brave femme qui ne s’occupait que de l’enfant confié à ses soins, cet appartement se trouvait dans l’aile droite du château. C’était un de ceux qu’on donnait de préférence aux intimes de Pampeln. Fort élégamment meublé, il se composait d’une chambre à coucher, d’un grand cabinet de toilette salle de bains et d’un petit salon.

Arrivée chez elle, la jeune fille éclata en sanglots.

Ainsi c’était fini, le prince l’abandonnait. Sans souci de l’amour qu’il avait fait naître, amour qu’il n’avait pas deviné ou que peut-être il méprisait, il partait, la laissant avec ses souvenirs et son désespoir. Elle n’avait été pour lui qu’un instrument dont il se débarrassait sans pitié. Son rêve n’était qu’un mensonge : il ne l’aimait pas ! Eh ! que lui faisait le bien-être dont il voulait qu’elle jouît ! Son avenir n’était-il pas brisé à jamais ? Alors, pourquoi demeurerait-elle à Pampeln ? Non, elle ne voulait pas ! C’était près de son père seulement qu’elle pourrait trouver l’oubli. De ces bijoux, des ces vêtements luxueux qui lui avaient été donnés, elle ne garderait rien. Tout cela lui rappellerait des heures d’ivresse et d’espérance qu’elle devait chasser de sa mémoire. Elle retournerait chez son père comme elle en était partie, pauvre, non pas le lendemain, mais le soir même, sans voir celui qui ne pensait plus à elle. Ah ! la route de Pampeln à Elva, elle la ferait bien seule, à pied, comme autrefois, lorsqu’elle était toute petite, alors qu’elle ne connaissait que de vue, parce qu’elles s’arrêtaient à la ferme, les jours de chasse, ces élégantes voitures dans lesquelles elle s’était promenée à Paris. La nuit ne l’effrayait pas. D’ailleurs, quel malheur plus grand que celui qui la frappait pourrait maintenant l’atteindre !

Et l’infortunée, les yeux remplis de larmes, les che-