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avait été son mari, de la décision du Saint-Synode, elle commença à espérer que la famille de la rue de Douai reviendrait à de meilleurs sentiments à son égard.

Le peintre lui-même le croyait. D’ailleurs, humilié d’être ainsi traité en petit garçon par sa mère et sa belle-sœur, il était parfaitement décidé à se passer d’un consentement qu’il lui faudrait acheter, si tant est qu’il dût jamais l’obtenir, par une lutte trop longue ; et il avait laissé pressentir qu’il ne remettrait pas au jour de son mariage pour quitter la maison et s’installer chez lui. Aussi fut-ce très nettement qu’il annonça à sa mère, un soir, après le dîner, que, la princesse Olsdorf étant divorcée, il allait l’épouser dans le plus bref délai.

À cette nouvelle, attendue cependant, l’orage qui grondait depuis plusieurs semaines chez les Meyrin éclata avec violence. Il y avait trop longtemps que Mme Frantz se contenait pour ne pas prendre sa revanche au complet.

Mme Meyrin, absolument sous la domination de sa belle-fille, s’était contentée de répondre à son fils :

— Jamais je ne consentirai à te laisser épouser une femme divorcée, plus âgée que toi et qui n’est ni de notre monde ni de notre caste.

Mme Frantz s’était empressée d’ajouter :

— Sans compter qu’elle est mère de deux enfants et habituée à une existence de luxe et de paresse qui n’irait guère avec la nôtre. Si tu crois que c’est avec ses vingt mille livres de rente qu’elle pourra tenir convenablement sa maison, accoutumée comme elle l’est à jeter l’argent par les fenêtres !

— Alors, moi, je ne suis bon à rien, riposta Paul. Bon an, mal an, je vends pour une vingtaine de mille francs, et j’espère bien que ça ne fera qu’augmenter. J’apporterai dans mon ménage autant que ma femme.

L’artiste ne pouvait se servir d’un argument qui sonnât plus mal aux oreilles de sa belle-sœur. Barbe avait d’excellentes raisons pour connaître les ressources de son beau-frère, puisqu’elle s’était faite sa caissière. C’était justement cet argent qu’il laissait dans la maison qu’elle