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— Tu n’as pas idée : une sale créature ! Un genre ! Marie-Louise, qu’elle s’appelle, Marie-Louise Rosay, les jeunes gens l’appellent Malou !

La colère aveuglait la grosse dame. Malou se tenait fort bien en somme, et l’élégance de ses toilettes était beaucoup plus correcte que les reconstitutions 1830 de ces demoiselles.

— Ce garçon-là cause un préjudice considérable à ses sœurs. C’est lui, tiens, c’est lui qui les empêche de se marier. Tu comprends, avec ses aventures !

— Au fait, j’ai organisé pour lundi un déjeuner sur l’herbe, avec Mme Toumyre, son fils, M. Langelier, un habitué d’ici.

— Quelle est sa profession, à ce M. Toumyre ?

— Il est dans l’enregistrement. Sa mère est veuve, retirée des affaires ; une petite aisance, je crois. Fils unique.

— Bien ! Bien ! approuvait M. Buquet du ton d’un capitaine félicitant son adjudant.

— Quel âge a-t-il, ce fils Toumyre ?

— Vingt-six.

— De l’avenir ?

— Oui. Un garçon très sérieux. J’ai remarqué pourtant qu’il regardait beaucoup cette Malou.

— Malou ?

— Oui, cette créature que Xavier connaît. Mais ces femmes-là cherchent de l’argent et des vieux.

— Pourtant, tu semblais dire tout à l’heure que Xavier ? Et Xavier n’a pas d’argent.

— Oui, mais Xavier…

Et Mme Buquet se redressait, malgré elle, orgueilleuse d’un fils à femmes et à succès.

M. Buquet, ragaillardi par le grand air et la liberté, descendait la côte allègrement, dînait de bon appétit ; et debout le dimanche matin, au son des cloches de la messe de sept heures, s’habillait — pantalon et veston gris, gilet blanc, souliers jaunes, chapeau de paille — et