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mènes ; mais, pour provoquer ses confidences, il ajouta : « Remplir le rôle que vous jouez, vous faire suivre des foules, intéresser les savants, fonder des sociétés dans des terres lointaines, créer un mouvement comme celui-là ! Pourquoi donc suis-je attiré à vous contre ma volonté ? De ma vie, je n’ai jamais rencontré une femme aussi extraordinaire que vous, et je suis sûr de ne jamais en rencontrer une autre. Oui, Helena Petrowna, je vous admire comme une force véritable. » Mme Blavatsky, se laissant prendre à cette flatterie, répondit : « Ce n’est pas pour rien que nous nous sommes rencontrés… Olcott est utile dans sa place, mais il est généralement semblable à un âne (sic). Combien de fois il m’a laissée là, combien de soucis il m’a causés par son incurable stupidité ! Si vous voulez seulement me venir en aide, nous étonnerons le monde à nous deux, nous aurons toutes choses dans nos mains »[1]. C’est alors que Solovioff se fit désigner les véritables auteurs des lettres de Koot Hoomi ; il se fit même montrer encore la clochette magique que Mme Blavatsky dissimulait sous son châle, mais elle ne voulut pas lui en laisser examiner le mécanisme à loisir. Pour conclure cet entretien, Mme Blavatsky lui dit : « Préparez le terrain pour que je travaille en Russie ; je croyais que je ne pourrais jamais y retourner. mais à présent c’est possible. Quelques personnes font là-bas tout ce qu’elles peuvent, mais vous pouvez plus qu’aucune d’elles maintenant. Écrivez davantage, louangez la Société Théosophique, excitez l’intérêt, et créez les lettres russes de Koot Hoomi ; je vous donnerai tous les matériaux pour cela »[2]. Solovioff aurait certainement pu rendre à Mme Blavatsky les services qu’elle lui demandait, car, fils d’un historien célèbre et écrivain lui-même, il occupait en outre une situation à la Cour de Russie ; mais, loin d’accepter, il prit congé d’elle deux ou trois jours après et partit pour Paris, en se promettant

  1. A modern priestess of Isis, pp. 153-154.
  2. Ibid., p. 158.