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jet, vénération qui va jusqu’à une véritable idolâtrie ; est-ce parce qu’ils trouvent les « Maîtres » trop éloignés et trop inaccessibles, ou parce que le prestige de ces êtres extraordinaires rejaillit sur ceux que l’on croit être en relations constantes avec eux ? Peut-être l’une et l’autre de ces deux raisons y ont-elles une part ; on conseille à l’« étudiant » qui désire se mettre en rapport avec les « Maîtres » de passer d’abord par l’intermédiaire de leurs disciples, et surtout de la présidente de la Société Théosophique : « Il pourra, dit M. Wedgwood, mettre son esprit à l’unisson du sien (c’està-dire de celui de Mme Besant) au moyen de ses ouvrages, de ses écrits ou de ses conférences. Il s’aidera de son image pour atteindre à elle dans sa méditation. Chaque jour, à intervalles réguliers, il fixera cette image dans son esprit et lui enverra des pensées d’amour, de dévotion, de gratitude et de force »[1]. Quand nous parlons d’idolâtrie, il ne faut pas croire qu’il y ait là la moindre exagération de notre part ; outre le texte précédent, où l’emploi du mot « dévotion » est déjà assez significatif, on pourra en juger par ces deux exemples : il y a quelques années, dans une lettre confidentielle qu’il adressait à ses collègues en une une circonstance critique, M. George S. Arundale, principal du « Central Hindu College » de Bénarès, appelait Mme Besant a la future conductrice des dieux et des hommes » ; et plus récemment, dans une ville du Midi de la France, à la fête du « Lotus Blanc » (commémoration de la mort de Mme Blavatsky), un délégué du « Centre Apostolique » s’écriait devant le portrait de la fondatrice : « Adorez-la, comme je l’adore moi-même ! » Tout commentaire serait superflu, et nous n’ajouterons qu’un mot à ce sujet : si absurdes que soient des choses comme celles-là, il n’y a pas lieu de s’en étonner outre mesure, car, quand on sait à quoi s’en tenir sur les « Mahâtmâs », on est autorisé, par la déclaration de Mme Besant en personne, à conclure que le théosophisme n’est qu’une « absurdité ».

  1. Revue Théosophique française, 27 janvier 1914.