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le théosophisme

jamais dans l’Inde avant 1878, et que, jusqu’à cette époque, il ne fut jamais question des « Mahâtmâs » ; la suite en fournira des preuves suffisantes.

Vers 1858, Mme Blavatsky se décida à retourner en Russie ; elle se réconcilia avec son père et demeura auprès de lui jusqu’en 1863, époque où elle se rendit au Caucase et y rencontra son mari. Un peu plus tard, elle est en Italie, où elle avait vraisemblablement été appelée par un ordre carbonariste ; en 1866, elle est avec Garibaldi, qu’elle accompagne dans ses expéditions ; elle combat à Viterbe, puis à Mentana, où elle est grièvement blessée et laissée pour morte sur le terrain ; elle s’en remet cependant et vient achever sa convalescence à Paris. Là, elle fut quelque temps sous l’influence d’un certain Victor Michal, magnétiseur et spirite[1], dont le nom a été parfois défiguré dans les récits qui se rapportent à cette partie de sa vie : certains l’ont appelé Martial, d’autres Marchal[2], ce qui l’a fait confondre avec un abbé Marchal qui s’occupait aussi d’hypnotisme et de recherches psychiques. Ce Michal, qui était journaliste, appartenait à la Maçonnerie, de même que son ami Rivail, dit Allan Kardec, ancien instituteur devenu directeur du théâtre des Folies-Marigny et fondateur du spiritisme français ; c’est Michal qui développa les facultés médiumniques de Mme Blavatsky, et, par la suite, il ne parlait jamais sans une sorte d’effroi de la « double personnalité » qu’elle manifestait dès cette époque, et qui rend assez bien compte des conditions très particulières dans lesquelles elle composa plus tard ses ouvrages. Mme Blavatsky était alors spirite elle-même, elle le disait du moins, et elle se donnait précisément comme appartenant à l’école d’Allan Kardec, dont elle garda ou reprit par la suite quelques idées, notamment en ce qui concerne la « réincarnation ». Si nous semblons mettre en doute la sincérité

  1. Né à Grenoble en 1824, mort à Paris en 1889.
  2. Light, de Londres, 28 août 1897 et 27 mai 1899.