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demeurait improbable car, pour son éblouissement, entre elle et lui, dans une lumière que ne limitait aucune précision corporelle, la jeunesse, toute la jeunesse sauvage éclatait.

Après la séance, à Diane qui l’avait observé du fond de la salle et lui demandait pourquoi il avait si peu regardé le modèle, il répondait : « L’enfant Septentrion dansa deux jours et plut. » Diane se rappelait que, la veille, ils s’étaient juré de n’avoir point de secret l’un pour l’autre, mais ne songeait même point à reprocher le manquement au petit traité. Elle se contentait de la phrase vague, se défendait d’en remarquer la transparence. Pour Pierre, un peu honteux, et parce qu’il n’avait pas la force d’avouer, ni même d’en dire davantage, il essayait un sourire, mais ses lèvres avaient tant de peine à s’épanouir pour quelque simulacre de joie ou de contentement qu’on eût dit qu’un fil mince, bien horizontal, les coupait en deux.

Alors, il prenait la voix douce de ceux qui ont beaucoup à se faire pardonner, il offrait à la jeune fille de la reconduire chez elle, serrait son bras contre le sien mais ne pouvait lui faire don de ses pensées, de son esprit qu’il sentait se perdre dans il ne savait au juste quel brouillard.

Arrivés devant la maison de Mme Blok, d’un air absent, il disait au revoir, bredouillait pour refuser la tasse de thé que Diane lui demandait de monter