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poussière et rien que poussière, mais honteuse des chambres qui donnent sur la cour, elle connaît la torture de ne pouvoir rien désigner à l’envie de Mme Blok. Son passé, le domaine des souvenirs. Ni plus ni mieux qu’un vulgaire cabinet de débarras, où d’ailleurs, il ne lui est même pas permis de reléguer définitivement les piètres accessoires de sa vie conjugale, puisque, c’est un fait, le divorce lui demeure interdit.

Mme Blok sait-elle pourquoi ?

Mme Blok ne sait pas pourquoi, ne demanderait qu’à le savoir mais a peur de se montrer indiscrète.

Indiscrète ?

Une dextre souveraine apaise des scrupules.

Indiscrète ?

Ont-elles donc des secrets l’une pour l’autre ? Et puisqu’elles ont souffert l’une et l’autre, pourquoi épargner dans leurs confidences les hommes, ces bourreaux. Elles sont deux femmes dans un salon d’Auteuil, deux sœurs de misère.

Des sœurs de misère. Voilà le mot. Bien entendu c’est Mme Dumont-Dufour qui l’a trouvé. Elle en est aussi fière que de ses plats de cuivre marocain et de ses vases de Chine. Des sœurs de misère. L’épithète ne manquera pas de faire son petit bonhomme de chemin. Mme Dumont-Dufour l’a prise pour étendard et sent qu’elle va de ce drapeau tirer des effets aussi surprenants que Lamartine du tricolore. Mme Dumont-