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et pour l’apaiser lui livrerait Cloupignon pieds et poings liés. En attendant afin de lui montrer le cas qu’elle en fait, elle sort de son sac une lettre, la tend à Pierre, explique.

— C’est une lettre de Cloupignon. Comme je lui ai fait comprendre que je n’avais pas le moindre désir de devenir sa femme, il a juré de me conquérir. Tous les deux jours il m’écrit. Ce soir j’ai reçu un petit tableau de sa vie sentimentale, avec forces accolades, traits à encre rouge, petits compartiments.

Diane a parlé très vite. À nouveau elle a peur. Elle n’ose regarder Pierre qui lui demande.

— Oui ou non épouses-tu ton Cloupignon ?

— Non.

— Tu as tort. Ce garçon sage, précis, raisonnable, voilà bien ton affaire.

— Pierre ne te moque pas de moi.

— Si tu n’avais pas au fond le désir d’épouser Cloupignon, tu n’encouragerais pas cette correspondance. Tu ne décachèterais même pas ses lettres mais, avoue, tu es toute fière qu’un ingénieur chimiste daigne t’envoyer le bilan de son cœur, avoue.

— Écoute Pierre, ne plaisantons pas.

— Ne plaisantons pas. Tu es délicieuse. Qu’est-ce qui m’a raconté l’histoire de la caissière à la rate déchirée, qu’est-ce qui me montre maintenant le résumé confidentiel et calligraphié de la vie intérieure de notre cher