Page:René Crevel La Mort Difficile 1926 Simon Kra Editeur.djvu/117

Cette page n’a pas encore été corrigée


— Eh bien ?

Pierre ne répond pas. On lui fait remarquer qu’on lui a laissé le temps de réfléchir : Parle.

— De quoi ?

Deux épaules se haussent sous du crêpe marocain :

— Parleras-tu ?

— Je n’ai rien à vous dire.

— Tu n’as rien à me dire ? En es-tu bien sûr ?

— Sûr et certain.

Et une gamme de ricanements de commencer.

Mme Dumont-Dufour ne veut pas manquer la scène principale, aussi cherche-t-elle une phrase à l’emporte-pièce que d’ailleurs elle ne trouve point, s’étrangle de rage et finit par sortir un mot en vrille :

« Avorton. »

Pierre : Je suis mal fichu, d’accord, mais la faute à qui ? Soyez persuadée que, si je vous avais faite, vous eussiez été encore mieux réussie.

— Avorton ! répète Mme Dumont-Dufour, et avorton, explique-t-elle, non par ma faute, mais celle de ton père, de ce père que tu respectes, que tu admires, tandis que moi qui ai tout fait pour toi, qui me suis sacrifiée…

Pierre entrevoit le discours et l’armée de cauchemars. Il ne supportera ni l’un ni l’autre.

Que Mme Dumont-Dufour se montre habile, rusée, lui sera fort, brutal même. Il saisit deux poignets