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a fait vingt jours de mer pour goûter à l’esprit français, va remporter, dans sa mémoire, cet aspect inédit de Napoléon… de Napoléon, dont il ne reste plus grand chose après une douzaine de pâteuses et aulardiques leçons !

Que voulez-vous ! La Vérité d’abord. Elle échappe quelquefois à M. Aulard, mais il croit la rattraper comme son lorgnon, et, discret, modéré, frottant ses mains, il dit sans haine, sans aucune haine :

— Napoléon, Messieurs, fut l’ennemi de l’intelligence. On ne peut pas faire son éloge dans cette Sorbonne.

Et, ma parole, il s’animerait et dépasserait ses droits d’historien scientifique, pour montrer tout à coup, dans un grondement, que… Napoléon a brimé et bridé la sacro-sainte Révolution ! Ah ! Ah ! C’est que là, permettez, la question devient grave. La chaire de la Révolution est à M. Aulard et n’est qu’à lui ! Et M. Aulard frissonne à l’idée d’un Bonaparte antirévolutionnaire, qui, même après plus de cent ans, le gênerait dans sa place.