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Fixer Napoléon, ce serait le fausser ; ce serait même en faire… un imbécile ! Car il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas. Or, s’il n’a pas été imbécile, il a changé. Donc, on ne peut pas savoir comment il était ; et il convient que sa figure reste vague.

Ainsi M. Aulard, dont la voix benoîte indique qu’il est plein d’intentions délicates, M. Aulard pourra patauger dans son eau trouble, tandis que l’auditeur, à demi noyé, n’aura plus la force d’une protestation. Cet excellent maître s’y connaît en prudence : il ne heurte jamais son public de front ; ce n’est pas sa faute, s’il le corrompt et le renvoie mal à l’aise : il obéit à sa nature. Au printemps, il arrive qu’un coup de vent vous enrhume : le vent printanier pourtant fait partie de la poésie du monde ; mais il arrive aussi qu’un microbe, que vous ne voyez ni ne sentez, vous inocule sournoisement la grippe. M. Aulard ressemble au microbe plus qu’au vent.

Comme il devine, d’ailleurs, l’écœurement de son auditoire, qui, malgré la lenteur du