Page:René Benjamin - La farce de la Sorbonne, 1921.djvu/42

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

paraissait la proie d’une manie affreuse, laquelle le possédait tout entier : « la Révolution laïque ». Il y semblait empêtré jusqu’au cou. N’en sortait-il jamais ? Quand sa bonne lui apportait ses pantoufles, est-ce qu’il évoquait les principes de 89 ?

Cette année, avec obstination, pour la troisième fois, je suis retourné le voir. Entre temps, je m’étais laissé conter que c’était un homme exquis, tout en indulgence, un vieillard si doux qu’il était larmoyant, un maître presque naïf, dont la surprise pénible était de ne pas être aimé de tous, puisque pour tous, toujours, il savait trouver un bon mot fraternel. Et le monde était injuste, m’avait-on dit, de ne pas être attendri par le cœur innocent, si digne et si suave, de M. Aulard.

Ah ! braves gens, confiants et simples ! Voulez-vous que nous entrions ensemble ? Que m’apprenez-vous là ? Regardez ! Écoutez ! Si vous avez le goût des belles lignes, des jours clairs, des pensées larges, si vous nourrissez votre vie de santé morale et d’honnêteté intellectuelle, avouez que